Coucou les poux! Je croule sous le travail en ce moment donc pas de critique cette semaine. Mais bien évidemment, un petit article pour vous présenter 4 films sur des femmes iraniennes éprises de pouvoir et de liberté. Puis je vous dirai tout le bien que je pense de Drag Race. On se quittera bien sûr avec trois petites recommandations culturelles!
Une manifestation en soutien aux femmes iraniennes à Paris Source: RFI Crédit: AURELIEN MOISSARD/APLes Iraniens, et surtout les Iraniennes, ne tressaillent pas. Voilà plus de deux mois qu'ils bravent l'un des régimes les plus durs au monde. Il y a un peu plus de deux mois, Mahsa Amini, étudiante iranienne de 22 ans, mourait, battue à mort par la police des moeurs. Les femmes iraniennes avaient défilé par dizaines dans les rues de Téhéran. On les a également vues enlever leur voile et se couper des cheveux dans des vidéos devenues virales sur les réseaux sociaux. Leur slogan, "Femme, Vie, Liberté" est désormais le symbole d'un soulèvement qui rassemble étudiants, commerçants, artistes et intellectuels.
Cela fait plusieurs années que le cinéma est une arme à part entière pour les opposants à la République islamique. Pour Cultea, j'ai sélectionné 4 films qui mettent en scène des femmes qui se battent. Des héroïnes du quotidien. En toile de fond, un pouvoir répressif au possible qui brise des individualités. Surtout, chaque film présente un Iran tiraillé où sexe et drogue côtoient, voire fréquentent, mollahs et rigorisme religieux.
Pour lire mon article, c'est par ici.
Mes cher.e.s ami.e.s,
Il y a quelques jours, je me suis rendue à un événement co-organisé par la célébrissime application de rencontres Tinder et le Sidaction. Il y avait une tombola et une vente aux enchères au profit du Sidaction, des bières pas trop chères et des shows de Drag Queens. Tout l'argent récolté allait au Sidaction, qui lutte contre le VIH depuis 1994. Dans le public, des jeunes, des vieux, des militants LGBTQI+, des couples hétéros tout droit sortis de la start-up nation, un groupe de copines qui ont bu de la vodka-pomme toute la soirée et des gens qui fumaient dans les plantes... Moi, j'ai versé ma petite larme.
Pour les boomers, les Drag Queens sont à l'origine des hommes qui se travestissent en femmes. Elles deviennent ensuite des icônes militantes pour les droits des personnes LGBTQI+. Et aujourd'hui, comme le dit très justement la journaliste Mathilde Serrell dans sa chronique "Un monde nouveau" sur France Inter, les Drag Queens nous encouragent en fait à éclore, à dévoiler une partie plus extravertie de nous. Bref, elles veulent nous libérer des injonctions sclérosantes de la société. Cette année, Drag Race, un concours de Drag Queen a été diffusé sur France 2. C'est une première dans notre pays. Vous pouvez d'ailleurs retrouver tous les épisodes sur France TV Slash. Il s'agit à mon sens d'une avancée très importante. La télé, les réseaux sociaux jouent un rôle central dans la construction des enfants et des adolescents. Les médias, Instagram et bien sûr la publicité établissent des normes pernicieuses et puissantes, surtout pour les jeunes. Je n'invente rien, on ne compte plus le nombre d'études sur le sujet.
Adolescente, je fréquente un collège privé catholique où s'encanaillent les rejetons de la bourgeoisie du nord-lyonnais. Les règles sont claires: pour être cool, il faut être hétéro, avoir des fringues de marque et fumer des clopes en cachette. On fait ce qu'on veut, on est d'accord. Ce qui est plus embêtant, c'est que l'on se moque de celles et ceux qui ne sont pas dans la norme. On ricane de celle qui a les cheveux rouges. Un tel est trop gros, une autre sent un peu trop fort la transpiration. On pointe du doigt celle qui n'est pas épilée. On traite de PD le garçon qui traîne un peu trop avec des filles ou qui n'a pas encore eu de petite copine à quinze ans. Bref, je grandis dans un univers très straight, hétéronormé, pour le dire autrement.
J'ai arrêté d'entendre ces absurdités quand je suis entrée en première littéraire. Nous étions des petits troubadours bienveillants qui dénotaient par rapport au reste de la population. Je tiens d'ailleurs à préciser que je garde tout de même des très bons souvenirs de mon collège et de mon lycée. J'ai rencontré trois personnes qui sont désormais mes piliers. Et puis il y a eu cette prof de français blonde platine qui m'a fait aimer la littérature.
Quel est le lien avec les Drag Queens allez-vous me demander? Eh bien ces normes ne viennent pas de nulle part. Quand je rentrais du collège et que je profitais de l'absence de mes parents pour regarder la télé, un mannequin brésilien devenue conseillère en image croassait mille normes vestimentaires à la minute comme: "si vous avez des formes, évitez les vêtements moulants" ou encore "petite poitrine = maxi décolleté". Comprenez bien sûr, pas de décolleté pour les personnes aux poitrines généreuses. Pourquoi? Bah parce que c'est comme ça. Oui, oui, c'est pour le moins arbitraire. Sur une autre chaîne, on pouvait suivre les aventures de jeunes gens enfermés dans une somptueuse villa à l'autre bout du monde. Le graal pour ces jeunes gens était de réussir à se "mettre en couple" (hétérosexuel, cela va de soi). Les filles étaient comme des clones: du silicone dans les fesses et dans les seins, une taille fine, un bikini, des lèvres pulpeuses et des jambes épilées. Cerise sur le gâteau, elles devaient être à la disposition des garçons. Là encore, on est libre de regarder ce que l'on veut. Mais ces programmes télévisés véhiculent des normes dont mes petits camarades de collège se sont servis, inconsciemment bien sûr, de ces normes pour se moquer, pour harceler. Et c'est là que je me mets à grogner.
Selon moi, les Drag Queens peuvent nous aider! D'abord parce qu'elles apportent un peu de diversité à la télé et sur les réseaux sociaux. Et puis parce qu'elles envoient valser l'hétéronormativité (considérer que l'hétérosexualité est la seule orientation sexuelle normale) et remettent les personnes LGBTQI+ sur le devant de la scène. En nous encourageant à l'extraversion, les Drag Queens nous poussent à être nous-mêmes, donc à faire fi de toutes les règles imposées par la société.
Moi, j'aurais adoré grandir dans un monde avec des shows de Drag Queens en prime-time. Peut-être que j'aurais été moins coincée, moins mal dans ma peau. Et peut-être bien que les poilus, les potelés et tous ceux qui découvraient leur bisexualité ou leur homosexualité auraient été moins harcelés.
Alors vive les Drag Queens et surtout, vive la diversité des représentations à la télé!
Sur ces bonnes paroles, à la semaine prochaine mes poux d'amour!
PS: et si le sexisme dans la télé-réalité vous intéresse, je ne peux que vous conseiller le travail passionnant de la journaliste Constance Vilanova!
Ne partez pas! Voici un film, un podcast et un livre qui ont fait palpiter mon petit coeur cette semaine!
Affiche du film Mommy Source: CINE NODEMommy est l'un de mes films préférés. A chaque fois que je dois conseiller un film, j'ai envie d'en parler. Ça me brule la langue, j'ai envie d'expliquer à quel point Mommy m'a marquée. Mais j'ai toujours peur que mes mots un peu pâteux n'abîme ce magnifique travail du réalisateur canadien Xavier Dolan.
Ce film est beau. Trois personnages, un peu cassés par la vie, portent cette oeuvre d'art: Diane, une mère veuve à deux doigts de la banqueroute qui récupère son fils, Steve, violent, autodestructeur (comme ont savamment dit les critiques) et leur voisine, Kyla, devenue muette. Le temps d'un peu plus de deux heures, tous trois essaient de briser leur vie de chien pour se lier les uns aux autres.
Xavier Dolan mélange finement des scènes du quotidien, réalistes voire naturalistes, et des moments qui transcendent très justement cette réalité un peu pesante. Le regard du réalisateur sublime les trois personnages qui très vite deviennent poétiques. Ils cherchent en nous notre humanité la plus profonde, la plus pure. Une humanité qu'on serait peut-être beaucoup à partager, qui sait?
Logo de Programme B Source: SPOTIFY Crédit: BINGE AUDIOLa bande-annonce de la série Netflix Monstre, consacré au tueur en série Jeffrey Dahmer, m'avait mise très mal à l'aise. "Tu es vraiment une petite nature Sophie, fais donc un effort! Ta grand-mère et ta maîtresse de CE2 te l'ont dit à plusieurs reprises, tu es beaucoup trop sensible!", m'étais-je dit alors, encore un peu habitée par une résilience toxique (rassurez-vous, je me soigne). Et puis j'ai compris que la série avait gêné de nombreuses personnes dont une de mes meilleures amies et le journaliste Thomas Rozec. On est trois, c'est déjà pas mal.
Dans le 25ème épisode de la saison 3 de "Programme B", Thomas Rozec s'intéresse au succès de cette série Netflix. Le journaliste soulève notamment le problème des nombreuses personnes qui ont témoigné de leur empathie pour le serial killer sur les réseaux sociaux. Comment traiter des tueurs en série à l'écran? Est-on vraiment obligé de s'attarder sur des crimes si atroces? Comment éviter que certains ne voient en un criminel qui a brisé la vie de dizaines de personnes une forme d'héroïsme? Thomas Rozec esquisse quelques pistes avec son invité, l'auteur de BD Derf Beckerf, à l'origine de Mon ami Dahmer. Le bdiste a été le camarade de classe de Jeffrey Dahmer. Dans son travail, il retrace l'enfance de Dahmer et ne fait aucune référence aux crimes. Derf Beckderf fait une anamnèse de Jeffrey Dahmer pour essayer de comprendre les faits, sans toutefois les minimiser. Une BD beaucoup plus édifiante que la série Netflix!
Couverture de l'ouvrage Guns and roses: les objets des luttes féministes Source: BabelioQuand j'étais en hypokhâgne, mon prof d'histoire nous avait rendu des dissertations, toutes très mauvaises évidemment. Mais il nous avait lancé: "Vos copies sont des hécatombes, vous ne citez aucun nom! Mais l'histoire, c'est du concret! Des hommes, des femmes etc.". Cette phrase m'avait fait comprendre pourquoi j'aimais l'histoire. Elle m'avait donné envie ensuite de poursuivre en master d'histoire. Quelques années plus tard, une de mes enseignantes de master avait tout résumé: "Quand on fait de l'histoire, on a les deux pieds et les deux mains dans la boue!". Cette femme avait tout à fait plié le game, nous sommes d'accord.
L'Histoire, c'est donc du concret, du réel. Autour des grands événements qu'on nous fait apprendre par coeur à l'école, il y a tout un tas d'éléments malheureusement laissés de côté. Des hommes, des femmes, des lieux mais aussi des objets. Dans Guns and roses: les objets des luttes féministes, l'historienne des révolutions Mathilde Larrère, revient sur les objets au coeur des luttes féministes. L'autrice de Rage against the Machism poursuit son exploration de ces moments de rupture que sont les révolutions. Elle inscrit les combats féministes dans un temps long et nous permet de mieux comprendre des mobilisations très contemporaines. L'historienne tisse par exemple des liens entre les colleuses et Olympe de Gouges, à l'origine de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Le tout avec une plume vive et drôle, pour notre plus grand bonheur.